Charte des droits et libertés de la
personne âgée

Charte des droits et libertés de la personne âgée

Fondation Nationale de Gérontologie Ministère de l’Emploi et de la Solidarité 1997.
La vieillesse est une étape de l’existence pendant laquelle chacun doit pouvoir poursuivre son épanouissement.
La plupart des personnes âgées resteront autonomes et lucides jusqu’au dernier moment de leur vie
L’apparition de la dépendance, quand elle survient, se fait à un âge de plus en plus tardif.
Cette dépendance peut être due à l’altération de fonctions physiques et/ou à l’altération de fonctions mentales.

Même dépendantes, les personnes âgées doivent continuer à exercer leurs droits, leurs devoirs et leur liberté de citoyens. Elles doivent aussi garder leur place dans la cité, au contact des autres générations dans le respect de leurs différences. Cette Charte a pour objectif de reconnaître la dignité de la personne âgée devenue dépendante et de préserver ses droits.

ARTICLE I – CHOIX DE VIE

Toute personne âgée dépendante garde la liberté de choisir son mode de vie. Elle doit pouvoir profiter de l’autonomie permise par ses capacités physiques et mentales, même au prix d’un certain risque. Il faut l’informer de ce risque et en prévenir l’entourage. La famille et les intervenants doivent respecter le plus possible son désir profond.

ARTICLE II – DOMICILE ET ENVIRONNEMENT

Le lieu de vie de la personne âgée dépendante, domicile personnel ou établissement, doit être choisi par elle et adapté à ses besoins. La personne âgée dépendante ou à autonomie réduite réside le plus souvent dans son domicile personnel. Des aménagements doivent être proposés pour lui permettre de rester chez elle.

Lorsque le soutien au domicile atteint ses limites, la personne âgée dépendante peut choisir de vivre dans une institution ou une famille d’accueil qui deviendra son nouveau domicile. Un handicap mental rend souvent impossible la pour suite de la vie au domicile. Dans ce cas l’indication et le choix du lieu d’accueil doivent être évalués avec la personne et avec ses proches.

Ce choix doit rechercher la solution la mieux adaptée au cas individuel de la personne malade. Son confort moral et physique, sa qualité de vie, doivent être l’objectif constant, quelle que soit la structure d’accueil. L’architecture des établissements doit être conçue pour répondre aux besoins de la vie privée.

L’espace doit être organisé pour favoriser l’accessibilité, l’orientation, les déplacements et garantir les meilleures conditions de sécurité.

ARTICLE III – UNE VIE SOCIALE MALGRE LES HANDICAPS

Toute personne âgée dépendante doit conserver la liberté de communiquer, de se déplacer et de participer à la vie de la société.

Les urbanistes doivent prendre en compte le vieillissement de la population pour l’aménagement de la cité.

Les lieux publics et les transports en commun doivent être aménagés pour être accessibles aux personnes âgées, ainsi qu’à tout handicapé et faciliter leur participation à la vie sociale et culturelle.

La vie quotidienne doit prendre en compte le rythme et les difficultés des personnes âgées dépendantes, que ce soit en institution ou au domicile. Toute personne âgée doit être informée de façon claire et précise sur ses droits sociaux et sur l’évolution de la législation qui la concerne.

ARTICLE IV – PRESENCE ET ROLE DES PROCHES

Le maintien des relations familiales et des réseaux amicaux est indispensable aux personnes âgées dépendantes.

Le rôle des familles, qui entourent de leurs soins leurs parents âgés dépendants à domicile, doit être reconnu. Ces familles doivent êtres ou tenues dans leurs tâches notamment sur le plan psychologique. Dans les institutions, la coopération des proches à la qualité de vie doit être encouragée et facilitée.

En cas d’absence ou de défaillance des proches, c’est au personnel et aux bénévoles de les suppléer.

Une personne âgée doit être protégée des actions visant à la séparer d’un tiers avec qui, de façon mutuellement consentie, elle entretient ou souhaite avoir une relation intime.

La vie affective existe toujours, la vie sexuelle se maintient souvent au grand âge, il faut les respecter.

ARTICLE V – PATRIMOINE ET REVENUS

Toute personne âgée dépendante doit pouvoir garder la maîtrise de son patrimoine et de ses revenus disponibles. Elle doit pouvoir en disposer conformément à ses désirs, sous réserve d’une protection légale, en cas de dépendance psychique.

Il est indispensable que les ressources d’une personne âgée soient complétées lorsqu’elles ne lui permettent pas d’assumer le coût des handicaps.

ARTICLE VI – VALORISATION DE L’ACTIVITÉ

Toute personne âgée dépendante doit être encouragée à conserver des activités. Des besoins d’expression et des capacités d’accomplissement persistent même chez les personnes âgées qui ont un affaiblissement intellectuel sévère.

Développer des centres d’intérêt évite la sensation de dévalorisation et d’inutilité. La participation volontaire à des réalisations diversifiées et valorisantes (familiales mais aussi sociales, économiques, artistiques, culturelles, associatives, ludiques, etc.) doit être favorisée.

L’activité ne doit pas être une animation stéréotypée, mais doit permettre l’expression des aspirations de chaque personne âgée.

Une personne âgée mentalement déficitaire doit pouvoir participer à des activités adaptées. Les activités infantilisantes ou dévalorisantes sont à rejeter.

ARTICLE VII – LIBERTE DE CONSCIENCE ET PRATIQUE RELIGIEUSE

Toute personne âgée dépendante doit pouvoir participer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix. Chaque établissement doit disposer d’un local d’accès aisé, pouvant servir de lieu de culte, et Permettre la visite des représentants des diverses religions. Les rites et usages religieux s’accomplissent dans le respect mutuel.

ARTICLE VIII – PRESERVER L’AUTONOMIE ET PREVENIR

La prévention de la dépendance est une nécessité pour l’individu qui vieillit. La vieillesse est un état physiologique qui n’appelle pas en soi de médicalisation. La dépendance physique ou psychique résulte d’états pathologiques, dont certains peuvent être prévenus ou traités. Une démarche médicale préventive se justifie donc, chaque fois que son efficacité est démontrée. Les moyens de prévention doivent faire l’objet d’une information claire et objective du public, en particulier des personnes âgées, et être accessibles à tous

ARTICLE IX – DROIT AUX SOINS

Toute personne âgée dépendante doit avoir, comme toute autre, accès aux soins qui lui sont utiles.

Aucune personne âgée ne doit être considérée comme un objet passif de soins, que ce soit au domicile, en institution ou à l’hôpital.

L’accès aux soins doit se faire en temps utile en fonction du cas personnel de chaque malade et non d’une discrimination par l’âge.

Les soins comprennent tous les actes médicaux et paramédicaux qui permettent la guérison chaque fois que cet objectif peut être atteint.

Les soins visent aussi à rééduquer les fonctions et compenser les handicaps. Ils s’appliquent à améliorer la qualité de vie en soulageant la douleur, à maintenir la lucidité et le confort du malade, en réaménageant espoirs et projets.

L’hôpital doit donc disposer des compétences et des moyens d’assurer sa mission de service public auprès des personnes âgées malades.

Les institutions d’accueil doivent disposer des locaux et des compétences nécessaires à la prise en charge des personnes âgées dépendantes, en particulier dépendantes psychiques.

Les délais administratifs abusifs qui retardent l’entrée dans l’institution choisie doivent être abolis.

La tarification des soins doit être déterminée en fonction des besoins de la personne âgée dépendante, et non de la nature du service ou de l’établissement qui la prend en charge.

ARTICLE X – QUALIFICATION DES INTERVENANTS

Les soins que requiert une personne âgée dépendante doivent être dispensés par des intervenants formés, en nombre suffisant.

Une formation spécifique en gérontologie doit être dispensée à tous ceux qui ont une activité professionnelle qui concerne les personnes âgées. Cette formation doit être initiale et continue, elle concerne en particulier, mais non exclusivement, tous les corps de métier de la santé.

Ces intervenants doivent bénéficier d’une analyse des attitudes, des pratiques et d’un soutien psychologique.

ARTICLE XI – RESPECT DE LA FIN DE VIE

Soins et assistance doivent être procurés à la personne âgée en fin de vie et à sa famille. Certes, les affections sévères et les affections mortelles ne doivent pas être confondues : le renoncement thérapeutique chez une personne curable constitue un risque aussi inacceptable que celui d’un acharnement thérapeutique injustifié.

Mais, lorsque la mort approche, la personne âgée doit être entourée de soins et d’attentions adaptés à son état.

Le refus de l’acharnement ne signifie pas un abandon des soins mais doit, au contraire, se traduire par un accompagnement qui veille à combattre efficacement toute douleur physique et à prendre en charge la douleur morale.

La personne âgée doit pouvoir terminer sa vie naturellement et confortablement, entourée de ses proches, dans le respect de ses convictions et en tenant compte de ses avis. Quel a mort ait lieu au domicile, à l’hôpital ou en institution, le personnel doit être formé aux aspects techniques et relationnels de l’accompagnement des personnes âgées et de leur famille avant et après le décès.

ARTICLE XII – LA RECHERCHE: UNE PRIORITE ET UN DEVOIR

La recherche multidisciplinaire sur le vieillissement et la dépendance est une priorité. Seule la recherche peut permettre une meilleure Connaissance des déficiences et des maladies liées à l’âge et faciliter leur prévention.

Une telle recherche implique aussi bien les disciplines biomédicales et de santé publique, que les sciences humaines et les sciences économiques.

Le développement d’une recherche gérontologique peut à la fois améliorer la qualité de vie des personnes âgées dépendantes, diminuer leurs souffrances et les coûts de leur prise en charge.

Il y a un devoir de recherche sur le fléau que représentent les dépendances associées au grand âge.
Il y a un droit pour tous ceux qui en sont ou en seront frappés à bénéficier des progrès de la recherche.

ARTICLE XIII – EXERCICE DES DROITS ET PROTECTION JURIDIQUE DE LA PERSONNE

Toute personne en situation de dépendance devrait voir protégés non seulement ses biens mais aussi sa personne.
Ceux qui initient ou qui appliquent une mesure de protection ont le devoir d’évaluer ses conséquences affectives et sociales.

L’exercice effectif de la totalité de leurs droits civiques doit être assuré aux personnes âgées y compris le droit de vote, en l’absence de tutelle. La sécurité physique et morale contre toutes agressions et mal-traitances doit être sauvegardée.

Lors de l’entrée en institution privée ou publique ou d’un placement dans une famille d’accueil, les conditions de résidence doivent être garanties par un contrat explicite, la personne âgée dépendante peut avoir recours au conseil de son choix.

Tout changement de lieu de résidence ou même de chambre doit faire l’objet d’une concertation avec l’intéressé.

Lors de la mise en œuvre des protections prévues par le Code Civil (sauvegarde de justice, curatelle ou tutelle), il faut considérer avec attention que: le besoin de protection n’est pas forcément total, ni définitif; la personne âgée dépendante protégée doit pouvoir continuer à donner son avis chaque fois que cela est nécessaire et possible; la dépendance psychique n’exclut pas que la personne âgée puisse exprimer des orientations de vie et doit toujours être informée des actes effectués en son nom.

ARTICLE XIV - L’INFORMATION, MEILLEUR MOYEN DE LUTTE CONTRE L’EXCLUSION

L’ensemble de la population doit être informé des difficultés qu’éprouvent les personnes âgées dépendantes.

Cette information doit être la plus large possible. L’ignorance aboutit trop souvent à une exclusion qui ne prend pas en comptes les capacités restantes ni les désirs de la personne. L’exclusion peut résulter aussi bien d’une surprotection infantilisante que d’un rejet ou d’un refus de la réponse aux besoins. L’information concerne aussi les actions immédiates possibles.

L’éventail des services et institutions capables de répondre aux besoins des personnes âgées dépendantes est trop souvent méconnu, même des professionnels. Faire toucher du doigt la réalité du problème et sa complexité peut être une puissante action de prévention vis-à-vis de l’exclusion des personnes âgées dépendantes et peut éviter un réflexe démissionnaire de leur part. Lorsqu’il sera admis par tous que les personnes âgées dépendantes ont droit au respect absolu de leur liberté d’adulte et de leur dignité d’être humain, cette charte sera appliquée dans son esprit.